mardi 7 mai 2024

Les "lettres américaines" de Bernard Pivot

 

Décédé le 6 mai 2024 à l'âge de 89 ans, Bernard Pivot s'est passionné pour l'Amérique. Au point de se voir décerner, en 1990, par la Revue américaine Connoisseur, le "Best Talk Show in the World", le prix de la meilleure émission mondiale de débats des programmes de télévisions américains, pour la diffusion de son émission littéraire "Apostrophes", aux Etats-Unis. La même année, il co-signe avec Gérard Ernault, "Pays de mes rêves : Etats-Unis d'Amérique".

Au cours de ses émissions littéraires, "Aspotrophes" et "Bouillon de culture", Bernard Pivot s'intéresse à de nombreuses reprises aux USA. En 1976, en compagnie d'écrivains et d'experts, il s'interroge sur la réalité du rêve américain et les raisons de notre fascination de l'Amérique, à travers les mythes fondateurs de cette nation. En 1980, trois jours avant l'élection d'un nouveau président américain, il dédie une émission au pouvoir aux Etats-Unis et  en Union Soviétique, en présence d'historiens et d'auteurs réputés.

En 1983, Bernard Pivot interviewe l'écrivain russe et Prix Nobel de littérature, Alexandre Soljenitsyne, réfugié dans sa maison de Cavendish, dans le Vermont, aux USA, après son expulsion de l'URSS. En 1985, l'actrice américaine Jane Fonda est l'invitée d'Apostrophes. De son propre aveu, le journaliste littéraire est tellement troublé par la beauté de son invitée qu'il en oublie d'interroger les autres autres écrivains présents sur le plateau. Au point de confesser plus tard avoir frôlé... la faute professionnelle.

Jane Fonda et Bernard Pivot en 1985, dans l'émission Apostrophes

En 1989, Bernard Pivot accueille dans son émission "Apostrophes" deux philosophes français, Michel Serres et René Girard, ayant fait le choix d'enseigner aux Etats-Unis. L'occasion d'évoquer les différences avec le système universitaire français et la satisfaction des étudiants américains. Enfin, en 1998, lors d'un "Apostrophes" spécial USA, le journaliste littéraire a l'occasion d'interviewer deux grands auteurs américains : Paul Auster, récemment disparu, et l'écrivaine afro-américaine Toni Morrison, prix Nobel de littérature.

Sa passion pour les Etats-Unis n'empêchait pas Bernard Pivot de se montrer parfois très critique à leur égard. Ainsi sur son compte "X" (ex-Twitter), en février 2018, publiait-il ce tweet : "La ressemblance entre l'Amérique et le Viagra? L'une et l'autre ont été découverts par sérendipité, c'est-à- dire en cherchant autre chose." Ou encore, en novembre 2016, lors de l'élection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis : "La Floride a basculé, les États Unis ont basculé, la Maison Blanche a basculé, le monde a basculé, et je m'accroche à l'échelle de Richter." 

Enfin, saviez-vous que Bernard Pivot circulait à bord d'une "belle américaine", une Cadillac blanche ? C'est du moins ce que prétend l'écrivain Alain Beaulieu, dans un roman publié en 2006. L'animateur d'Apostrophes y annonce à des écrivains célèbres, les prémices de l’intelligence artificielle (IA), dans le domaine littéraire avec un roman entièrement rédigé par une machine baptisée "Bookie Joe". Bernard Pivot se servait d'ailleurs souvent de la symbolique automobile pour nous livrer ses bons mots : "Contrairement à l'homme, quand une voiture vieillit très longtemps, sa valeur augmente, échappant ainsi à la casse à laquelle sont promis tous ses conducteurs, pilotes de Formule 1 et gilets jaunes compris." ou encore, "L'amour est une voiture à double chevron qui ne marche pas au super, mais au temps. Il faut le plus souvent faire le plein de temps." 

Herve CIRET 

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