Si DC, Marvel et Panini demeurent les maisons d'édition de comics les plus connues, Bliss Comics, éditeur bordelais apparu en 2016, a réussi à se hisser au même niveau d'exigence que celui de ces "Goliath" de la bande dessinée US, en reprenant le catalogue de l'éditeur américain Valiant pour mieux le valoriser sur le marché français.
A l'occasion de l'édition 2018 du salon du livre de Paris (16-19 mars), nous avons rencontré son fondateur, Florent Degletagne, un jeune entrepreneur passionné de comics depuis son adolescence.
Comment
est née l'idée de votre maison d'édition ?
Je
suis fan de comics américains depuis plusieurs années et notamment
de l'univers Valiant, que je publie aujourd'hui. J'ai eu
l'opportunité professionnelle de créer une maison d'édition et de
reprendre cet univers en France qui avait été abandonné par
l'éditeur Panini Comics, faute de ventes suffisantes, après l'avoir
publié durant deux ans. J'ai donc décidé de créer la société
Bliss
Comics
et j'ai contacté les éditeurs américains de l'univers Valiant, en
leur disant ce qu'il n'allait pas dans cette collection et en leur
proposant mes idées pour la valoriser pour le marché français.
L'éditeur américain m'a fait confiance et en avril 2018, nous
allons fêter les deux ans de publication.
Face
au géant Panini, les Américains ont donc préféré faire confiance
à un « Petit Poucet » ?
Oui,
ils m'ont donné ma chance, parce qu'ils se sont dit que les comics
Valiant publiés par Panini n'avaient pas marché en France et que la
licence n'y avait pas été exploitée correctement. Donc, voir
quelqu'un de passionné comme moi, qui se propose, avec de l'énergie
et de la passion, de créer spécialement une entreprise uniquement
pour publier leurs comics en France, les a apparemment convaincu. Les
éditeurs Américains ont eu la patience de m'accompagner, le temps
que je créé mon entreprise, sachant que je n'avais aucune
expérience dans l'édition et que durant les premiers mois de mon
activité, j'ai appris mon métier sur le tas.
Pouvez-vous
nous présenter l'univers Valiant, moins connu que ceux de DC Comics
et Marvel ?
L'univers
Vaillant est né au début des années 1990. C'est l'ancien
rédacteur-en-chef de Marvel qui, déçu de ne pas pouvoir racheter
Marvel, alors en difficulté, a quitté cette maison d'édition pour
fonder Valiant. Ce nouvel univers a connu un grand succès, avant de
péricliter et de renaître, en 2012, aux Etats-Unis, en y devenant
le troisième éditeur de super-héros. S'il commercialise moins de
titres que ses concurrents DC et Marvel - qui publient jusqu'à 80
titres différents par mois - Valiant en publie dix fois moins, mais
toujours d'une grande qualité. Il propose un univers super-héroïque,
un peu alternatif, plus ancré dans la réalité quotidienne.
Contrairement à DC ou Marvel, chez Valiant, il n'y a pas de Superman
qui met un costume en Spondex juste pour faire le bien. Leurs
personnages ont un cheminement psychologique et les thématiques
développées sont en lien avec l'actualité en évoquant
l'addiction, les problèmes de l'adolescence, les conflits de
génération, etc. Et les genres abordés vont du thriller à
l'espionnage en passant par les super-héros.
Quelle
a été votre démarche pour valoriser l'univers Valiant ?
Ma
démarche a été de me situer au même niveau que les autres
éditeurs français de comics, tels Delcourt, Glénat, Panini et
Urban Comics qui publie DC Comics. Ceci, afin que les libraires et
les lecteurs ne se disent pas Bliss Comics est un petit éditeur
confidentiel. Mais que ses publications sont du même standard de
fabrication, voire de meilleure qualité, en terme de super-héros,
que celles de ces éditeurs déjà bien établis. C'est ce que Panini
n'avait pas réussi à faire, car il s'occupait déjà de Marvel - et
maintenant des Star Wars comics – et donc l'univers Valiant a été
publié dans une collection pas suffisamment valorisée, dans un
format bâtard. Résultat, ses personnages n'intéressaient que 10 %
du lectorat de livres de super-héros. Mon objectif a donc été de
redorer l'image de Valiant en en faisant un univers crédible et en
proposant une véritable alternative à DC et Marvel. A priori, le
pari a été réussi, puisque deux ans après nos débuts, nous en
sommes à plus de 40 publications.
C'est
étonnant qu'un « Petit Poucet » ait réussi là où un grand
des comics avait échoué. Qui plus est depuis Bordeaux et non depuis
Paris ?
En
Nouvelle Aquitaine, il y a beaucoup d'éditeurs et, avec les
technologies actuelles, le fait de travailler en région ne pose
aucun problème, y compris en ayant son bureau chez soi, comme c'est
mon cas. De plus Bordeaux est une ville très attractive, où il fait
bon vivre et où c'est plus facile de vivre qu'à Paris. D'ailleurs les éditeurs
américains s'en fichent complètement. Pour eux, l'important ce sont les idées que je peux avoir pour
développer leur licence en France. Cela leur a prouvé que sur des
territoires où ils n'étaient pas forcément importés, il était
préférable de faire confiance à de petits éditeurs, qui défendent leurs livres, plutôt qu'à de gros éditeurs,
en leur confiant l'exploitation de leur licence, non seulement en
France, mais également, en Espagne et en Italie.
Propos et photo recueillis par Herve CIRET, lors du salon du livre de Paris 2018
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