Voici une bande dessinée qui commence comme un western pour se poursuivre comme un thriller. Pas un hasard, quand on connaît la passion de son auteur, Christian Lax, pour les westerns. "Mon récit se déroule dans l'Ouest américain que j'ai parcouru en voiture en réalisant des croquis et en prenant des photos, pendant plusieurs semaines. Notamment, Monument Valley,
lieu mythique du western, où John Ford a tourné ses plus grands films avec John Wayne et je voulais
rendre hommage à cette mythologie", explique le dessinateur et scénariste. "Un certain Cervantès" commence
donc, comme un western, dans un village de cow-boys pour touristes en Arizona, Apache
Trail, que Christian Lax a visité. "Durant les premières pages, je me suis arrangé, afin que le lecteur ait l'impression d'être dans un
western, pour le surprendre, le déstabiliser".
Car, cette BD est en fait une adaptation contemporaine du personnage de Don Quichotte. Un héros inventé au 16e siècle par un certain... Miguel de Cervantès, dont la vie romanesque a fasciné Christian Lax. "Avant de devenir écrivain, Cervantès est un baroudeur. Il a guerroyé pour le compte du roi
Philippe II d'Espagne. Il a perdu un bras lors de la célèbre bataille navale de Lépante, au large de la Grèce, qui opposait l'invincible Armada espagnole à la
flotte Ottomane."
De
retour d’Afghanistan, où les Talibans l'ont amputé d'un bras, le Marine Mike Cervantès
découvre, chez lui en Arizona, le roman "Don Quichotte" de son illustre homonyme, Miguel Cervantès. Au volant de sa "Rossinante", une Ford Mustang rutilante des années 1970, notre Don Quichotte, traverse les Etats-Unis, fermement décidé à se battre contre les injustices d'une société américaine qu'il juge trop libérale. "Je ne critique pas l'Amérique que j'aime, mais ce monde occidental dans lequel l'on
voit ressurgir différentes formes d'inquisition, comme aux 15e et 16e siècles espagnols", tient à préciser Christian Lax. "C'est
un coup de gueule qui me permet de faire ce que je n'ai pas le courage de faire, par personnage de papier interposé. Mike Cervantès est mon
double de papier, comme Don Quichotte fut le double de papier de
Cervantès finalement."
Cette bande dessinée est également un hommage aux grands espaces de l'Ouest américain. Car, à l'image du réalisateur de westerns, John Ford, Christian Lax pense que la grandeur des paysages
forge le caractère de ceux qui y vivent. "Quand on traverse ces paysages, on est marqué
par leur immensité, leur aspect désertique, car ils sont très peu
peuplés et l'on parcourt des centaines de kilomètres, sans voir âme qui
vive, sans voir un seul village. Il y fait très chaud, très sec, c'est un environnement hostile, où l'on rencontre des scorpions,
des serpents, etc. Donc, pour y vivre, il faut être un homme et un
vrai et pas une mauviette, pour reprendre le langage du western."
Alors, à quand un album western ? "J'aime beaucoup le western et quand je peux en revoir un à la télé, je ne me prive pas", reconnaît Christian Lax. "Effectivement, je rêve un jour de faire un western en bande dessinée. A condition de trouver un angle d'attaque original, de proposer quelque chose de personnel, car le western constitue un univers graphique intéressant. Evidemment, il y a l'ombre immense de Jean Giraud, avec son Blueberry, qui a fait, à mon avis, quelque chose d'inégalable, d'indépassable. Cependant, je pense qu'on peut s'en approcher, à l'image des dessinateurs François Boucq (série Bouncer) et Christian Rossi (série W.E.S.T).
Propos et photo recueillis par Herve CIRET, lors du festival Etonnants Voyageurs 2016 de Saint-Malo
"Un certain Cervantès" (Futuropolis) scénario et dessins de Christian Lax
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