dimanche 23 mars 2014

Salon du Livre : deux auteurs imaginent leur Far-West !


Lors du Salon du Livre de Paris (20-24 mars 2014), Florence Bouchy, du journal Le Monde, a demandé à des auteurs dont le dernier roman avait pour cadre les Etats-Unis, de décrypter leur Far-West imaginaire. Parmi eux, Hélène Gaudy et Patrick Grainville. 


Hélene Gaudy - Patrick Grainville
Dans son roman, Plein Hiver (Actes Sud), Hélène Gaudy évoque l'histoire d'un adolescent turbulent faisant son retour dans une ville du Nord des Etats-Unis, Lisbon, où il est loin d'être le bienvenu

Dans Bison (Seuil), Patrick Grainville imagine ce qu'aurait pu être la rencontre du peintre américain George Catlin - ayant réellement existé au 19e siècle - avec les membres d'une tribu d'indiens Sioux - qu'il a effectivement peints. "C'est une communauté qui vit dans une ville couverte de neige, où il fait froid,  vivant dans une atmosphère très fermée, même si la nature est omniprésente tout autour", explique Hélène Gaudy. "Dans cette ville vivent des adolescents qui voudraient parcourir le monde. Or, alors que l'Amérique est un pays qui fait rêver tout le monde, ces adolescents n'en voient presque rien. J'avais donc envie de jouer sur ce paradoxe d'un paysage magnifique, de la vie sauvage qui entoure cette ville et dont les habitants profitent assez peu."


Hélène Gaudy n'est jamais allée aux Etats-Unis. Pour écrire son roman, elle a donc effectué des recherches dans des livres et sur internet. "J'avais besoin de fabriquer la ville, à partir d'une vraie carte, afin d'en imaginer la disposition des rues, la faune, la flore et le nombre de ses habitants. Pour cela, je me suis beaucoup servie de clichés d'un photographe américain d'aujourd'hui, Gregory Crewdson, qui réalise des photos sur l'envers du décor américain. Et j'y ai ajouté ma part de fiction."

Hélène Gaudy
Comme il existe aux Etats-Unis d'autres villes s'appelant Lisbon, certains lecteurs ont fait des recherches, afin d'essayer de situer réellement la ville, pourtant imaginaire, dans un état américain. "Pour moi, c'est amusant de constater cela, car le but c'est justement que le public place cette ville là où il le veut et y projette ses propres images."


Le peintre George Catlin, quant à lui, a réellement visité une cinquantaine de tribus, du Mississippi au Black Hills dans le Dakota. Soixante ans avant le massacre de Wounded Knee en 1890, il voulait immortaliser ce peuple indien sentant qu'il allait disparaître. D'où le titre "Bison" qui symbolise l'existence et l'extermination des indiens. 




Patrick Grainville
Patrick Grainville s'est cantonné à l'une de leurs tribus, vivant sur les bords d'une rivière imaginaire, la Wapiti, un affluent du Missouri. "Là, j'ai imaginé un village Sioux, parce que Caltin les a peints, en 1832, en faisant une synthèse de ce qui se passait dans plusieurs tribus des plaines, et en racontant ce que faisait Catlin, précise l'écrivain. "Car, il ne parlait pas de lui-même, mais voulait témoigner de ce qu'il voyait. Il avait quitté le confort de sa vie à Philadelphie, sur la côte Est, pour voyager à cheval et aller à la rencontre des indiens, en pleine nature." 

Compte tenu du personnage historique, il paraissait difficile de pouvoir introduire une part d'imaginaire dans ce genre de récit. "J'ai toujours considéré que l'invention est créatrice de vérité, même si, dans le cas présent, j'ai dû m'appuyer sur une forte documentation", souligne Patrick Grainville. Car, je ne pouvais pas faire faire n'importe quoi à mes indiens.J'avais donc une obligation de véracité. J'ai donc lu beaucoup de livres sur les indiens, car ce que j'avais vu dans les westerns était assez erroné. Et au fur à mesure que je me documentais, j'y prenais goût et avais envie d'aller plus loin.Et une fois assimilé tout cela, j'ai repris ma liberté, en proposant ma part d'imaginaire, dans la limite du vraisemblable. Même si, on peut aller très loin avec les indiens, car ce sont des visionnaires."


Photos et reportage Herve CIRET

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