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jeudi 24 mars 2016

Nicolas Grenier, poète-géographe


Nous vous avons fait vivre l'édition 2016 du salon du livre de Paris (17-20 mars), à travers le regard d'éditeurs et d'auteurs américains ou écrivant sur les Etats-Unis et présents à cet évènement. Nous poursuivons par un poète français que l'Amérique a inspiré.

Enfant, Nicolas Grenier consultait déjà les cartes de son atlas de géographie avec curiosité. Notamment, celle de l'Amérique. Mais, c'est grâce au cinéma et à la littérature qu'il a commencé à voyager aux États-Unis. « L'intérêt pour ce pays s'est manifesté, lorsque j'ai écrit un ouvrage non publié intitulé Le livre à brûler », explique cet auteur de poèmes publiés dans une cinquantaine de revues francophones. « Dans l'un des chapitres, j'évoque le séjour d'un voyageur chez les Indiens. Durant six jours, celui-ci partage la mystique indienne, à travers des poèmes liés à l'oralité, aux incantations, au chamanisme et aux éléments naturels. » Quant aux westerns, petit, Nicolas Grenier – qui souhaitait devenir cinéaste - a baigné dedans. Mais, dans une moindre mesure, car ce sont les films français des années 1930 qui le passionnent. « Bien sûr, j'ai été fasciné par le souffle épique du western. Même si je me suis aperçu par la suite que ce cinéma était, en réalité, une vitrine de l'impérialisme américain. » Aujourd'hui, notre poète reconnaît qu'il évoquerait plutôt « le drame du génocide des différentes communautés indiennes ».


Nicolas Grenier a vingt-huit ans, quand il publie ses poèmes sur les cinquante et un États américains. Il a choisi d'écrire - non pas des haïkus comme aujourd'hui - mais des poèmes courts en vers libres. « J'ai imaginé une sorte de voyage extérieur, en voiture, mais aussi intérieur, dans chacun de ces États, alors que je n'avais jamais mis les pieds aux États-Unis. Parce que le travail de l'auteur, c'est d'imaginer. » Et notre poète de faire allusion au roman de Franz Kafka, « L’Amérique », dont l'action se déroule aux États-Unis, alors que l'auteur n'y a jamais mis les pieds.


Abraham Lincoln
Ensuite, Nicolas Grenier a l'idée d'exhumer certains poèmes écrits par des présidents américains et de les traduire. De George Washington à Barack Obama, en passant par Abraham Lincoln et Jimmy Carter. « Pour moi, ces textes ont constitué une découverte étonnante », reconnaît le poète. « Car, quand on connaît la poésie, on se méfie des profanes, qui plus est politiques. » Nicolas Grenier découvre ainsi qu'une grande majorité des présidents américains s'est mise à la poésie, de manière professionnelle ou amateur. « Les poèmes de Lincoln sont inspirés par le romantisme et la nature. Ceux du texan Jimmy Carter évoquent des souvenirs de jeunesse liés au terroir. Quant à Barack Obama, qui a publié ses poèmes dans une revue étudiante en Californie, sa poésie évoque son père adoptif et son quotidien de l'époque. » Pour Nicolas Grenier, cette passion de grands hommes d'État pour la poésie est une très bonne chose. « Parce que la poésie, au même titre que l'astronomie ou la botanique, fait partie des domaines qui structurent un individu et donc notre humanité. »


Et justement, le dernier recueil de poésie publié par Nicolas Grenier, sous forme de haïkus, est consacré à une aventure spatiale, celle de la sonde européenne Rosetta et de son robot Philae (l'Echappée Belle édition). « Mon défi était d'allier des contraires, de concilier l'immensité de l'univers et la petitesse de l'homme et aussi du haïku, qui n'existe que depuis trois cents ans. » Convaincu de la brièveté de la vie, notre poète estime que chacun de nos actes doit s'avérer utile. « En prenant le thème de Rosetta, donc de la technologie spatiale, l'on touche à des choses essentielles dans l'histoire de l'Humanité, parce que les astronautes qui sont allés là-haut sont des hommes hors du commun. » En choisissant de traiter ce sujet dans son dernier recueil de poésie, Nicolas Grenier veut attirer l'attention du public sur un domaine scientifique qu'il estime déterminant pour notre avenir. « Il faut créer des vocations d'ingénieurs, car ces derniers conçoivent des inventions qui élèvent l'homme et le font avancer, loin des gadgets de la société de consommation. » Et Nicolas Grenier de nous glisser un modeste conseil : « Cultivez le fait d'être soi-même, dans la modestie comme dans l'arrogance. »

A lire également L'Amérique au salon du livre de Paris                                                     Reportage et photo : Herve CIRET

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